Les archives diocésaines de Poitiers conservent plusieurs témoignages, autographes et copies conformes, de guérisons attribuées à l’image du Sacré-Cœur, ou au sang qu’elle a versé recueilli sur des linges ou des images. C’est ainsi que nous disposons du récit de 2 des 9 guérisons indiquées dans la liste de l’abbé Vachère que nous venons de lire. Témoignages imparfaits dans leur forme, ils n’en sont pas moins des documents intéressants de la bonne foi du prêtre et des personnes qui les rapportent.
1. Voici d’abord le témoignage autographe de la guérison de Marie-Louise Génonet rédigée par son mari.
« Je soussigné Paul Génonet, atteste sous la foi du serment que Marie-Louise Maretheu, son épouse, par la suite de grandes inquiétudes, fut prise de crises d’abord espacées, puis devenues à se produire plusieurs fois la semaine, quelquefois deux crises dans un jour. Enfin la dernière fois, quatre crises en 24 heures. Dans cette 4e crise, la dernière de toutes, la malade, à qui il fut impossible d’entrouvrir les dents, se coupa le bout de la langue. Dans toutes ces crises, la malade grinçait des dents, avec l’écume aux lèvres, les yeux étaient ouverts, le corps devenait rigide ainsi que cela se produit dans les attaques d’épilepsie. Il y atteste que depuis que la malade porte sur elle un linge ayant une goutte de sang provenant de la sainte image du Sacré-Cœur de Mirebeau, aucune rechute ne s’est produite.
Sous la foi du serment, il affirme à nouveau que ce qui est écrit ci-dessus est le témoignage de l’exacte vérité.
Fait à Cuillé le 24 août 1913.
Paul Génonet »
2. Nous connaissons également la copie du récit de la guérison de Théophile Millet rédigé par le curé d’Amberre. Ce récit donne un poids théologique aux événements de Mirebeau par l’exemple d’un mouvement de prière ecclésiale et paroissiale soutenu par ces faits, et par la portée « missionnaire » de la grâce obtenue, l’abbé Vachère ayant mentionné cinq conversions y faisant suite. Il montre aussi qu’il procède bien en pasteur d’âmes et pas en magicien, orientant les personnes qui recourent à lui vers la prière en paroisse et, en dernier facteur, à la foi prouvée par des œuvres concrètes. Un charisme de prophétie semble l’assister en même temps.
« Amberre, par Mirebeau en Poitou, diocèse de Poitiers (la Vienne)
Juillet 1912
Je soussigné, atteste sous la foi du serment que les faits suivants sont l’expression exacte de la vérité. Un jeune homme de ma paroisse, nommé Théophile Millet,[1] âgé de 22 ans, tombé malade, frappé dans sa vie et dans ses facultés mentales à la suite de 2 insolations.
Les soins du médecin ne purent rien contre le mal.
Monsieur l’abbé Vachère de Grateloup était venu me visiter, je le conduisis voir le pauvre malade. Sur ses conseils, il invita la famille de demander au Sacré-Cœur sanglant de Mirebeau la guérison de leur fils ; puis de solliciter des habitants d’Amberre à se rendre le matin et le soir à l’église pour faire en public cette même neuvaine.
La famille suivit ces conseils et à la grande édification de tous, le matin les femmes quittaient leurs occupations et venaient à la messe, et le soir, les hommes, malgré les fatigues de la journée, se rendaient à l’église et avec foi et piété demandaient au Sacré-Cœur la guérison de ce jeune homme. La foi de tous fut récompensée, car le 4e jour, le samedi, 1er juin, la maladie laissait le jeune homme et le dernier jour il terminait la neuvaine avec ceux qui l’avaient commencée. Le bon maître avait promis que le mal disparaîtrait le premier jour du mois qui lui était consacré et que le malade terminerait la neuvaine avec ceux qui l’avaient commencée pour lui. Ces paroles furent connues de tous. Le jeune homme, ayant commis une grave imprudence, retomba plus gravement malade que la première fois au point de ne laisser plus d’espoir. Monsieur l’abbé Vachère, appelé en toute hâte, donna
le même conseil qui fut entendu comme la première fois. Le mal ne semblait plus, cette fois, vouloir lâcher sa victime, quand le vendredi 5 juillet, Monsieur l’abbé Vachère vint trouver deux personnes et leur dit ceci : ce jeune homme ne reviendra à la santé qu’à la condition que vous fassiez le sacrifice que le bon maître vous demande. Le sacrifice ayant été accepté avec serment, le jeune homme sortit, le dimanche suivant, et le 20 dînait chez moi. Le dernier jour de la neuvaine il était rétabli. Dieu soit béni ! Cette maladie valut pour ma paroisse une bonne et salutaire mission. Action de grâces en soit rendu au Cœur adorable du bon maître ! » [2]
3. Nous renvoyons la lecture d’un témoignage de Marguerite Petit, d’Angers, sur sa guérison instantanée du cœur, à la suite du témoignage, négatif quant à lui, de Sœur Marie Epiphane (joint à la lettre de Mgr Humbrecht du 3 novembre 1913 au Saint-Office), car dans des circonstances similaires, ces faits se complètent, et s’accompagnant tous les deux d’appréciations du prêtre qu’il est utile de confronter.
4. Voici cependant une simple lettre d’une mère remerciant pour la guérison de son fils :
« Chinon le 26 mai 1921
Mon bon Monsieur l’abbé,
Je n’aurais jamais assez de reconnaissance envers le Sacré-Cœur et envers vous pour avoir guéri mon fils. Je voudrais que vous le voyiez pour en juger ; aussitôt qu’il me sera possible d’aller vous voir j’irai avec mon fils qui est très reconnaissant. Malgré tout je continue les mains, les lavements, le quinquina et le blé, si vous saviez, Monsieur, comme je suis heureuse de le voir comme il est maintenant, car c’était un véritable masque.
Comme je vous c’est très bon, je vous prie de faire une bonne prière au pied du Sacré-Cœur pour nous, et j’y ajoute un franc dans ma lettre afin que vous mettiez un cierge en mon intention pour remercier le bon Sacré-Cœur. Merci, Monsieur l’abbé, de tout cœur Votre très reconnaissante Marie Chamaillard »[3]
5. Le 18 novembre 1918, Marcelle Besnard s’adresse au Pape Benoît XV pour demander un enquête. Elle termine ainsi sa lettre :
« Pour obtenir un pareil jugement, Rome eut-elle les renseignements exacts et précis ? Une guérison miraculeuse dont je fus l’un des principaux témoins m’oblige à parler, à me jeter au pied de votre sainteté pour demander une enquête. Daignez agréer, très Saint-Père, l’humble hommage de ma respectueuse et profonde vénération avec laquelle je suis, de votre sainteté, l’humble enfant. »[4]
La chronique des faits qui l’entourent, tenue par l’abbé Vachère, signale d’autres cas. Exemples : « Ce matin, une personne de Paris m’annonçait la guérison d’un jeune enfant de trois ans. Beaucoup de malades ressentent de l’amélioration dans leur souffrance par l’application de linges teintés de sang ou ayant touché la Sainte Image. « (Février 1912)
« Le 15 août, un jeune homme de dix-huit ans vint remercier le Bon Maître de l'avoir guéri : quinze jours auparavant, il était venu infirme, pouvant péniblement marcher; il s'en retournait en marchant, et hier il affirmait sa guérison. II était accompagné d'une demoiselle de trente-deux ans, atteinte de même mal. Elle offrit ses béquilles, et elle s'en retourna, après les avoir laissées devant la Sainte Image. Aujourd'hui encore (15 août), une jeune femme de trente-trois ans, habitant Paris, est venue demander sa guérison. Avant son départ, elle affirma devant sa mère et moi qu'elle pouvait marcher sans appui et que le mal semblait parti. Miséricordias Domina in aeternum cantabo! » (1920)
Ses lettres aussi :
« Un nouvel ex-voto a été offert, hier, au bon Maître, pour une guérison obtenue. Ce sera une plaque de marbre. On voulait offrir une lampe mais comme mon artiste [Emile Noazet, mobilisé] est absent, j'ai préféré une plaque. »[5] Aujourd’hui encore, on peut voir au Calvaire de tels ex-voto.
Dans cette autre lettre, nous voyons l’abbé faire preuve de prudence et prendre soin de susciter des vérifications médicales en même temps que les attestations des curés :
« Il faudra recueillir, d'accord avec Mr le Curé, tous les renseignements concernant la guérison de cette femme [de St Jean de Sauves]. Si possible l'attestation du ou des médecins. Il faut qu'il en soit ainsi pour cette jeune fille de Segré. »[6]
Autre lettre, à M. V. Krebs.
« + Dieu soit béni !
Mirebeau, le 1er juillet 1920
Cher Monsieur,
Je reçois votre lettre du 28 juin et je tiens à vous confirmer que mon cher Jean Scheuer vous a dit l'exacte vérité sur les faits mystérieux qui se produisent ici depuis neuf ans.
Plus de quarante mille témoins pourraient, dans le monde entier, affirmer sous la foi du serment la réalité du fait. Les savants comme les ignorants, les croyants comme les incrédules, les médecins, les artistes ont vu le même fait sans aucune hallucination.
Le sang mystérieux qui découle de la Ste. image a été analysé pair plusieurs universités. La dernière analyse a été faite à Rome par l'éminent Professeur Nazari qui ne craignit pas d'affirmer que le vrai miracle était sur l'image et les saintes hosties sanglantes. Les principes corrodants du sang, nous dit-il, auraient dû détruire et l'image et l'hostie.
Quant a expliquer les phénomènes qui se sont produit sur cette image, c.a.d. la souffrance, la maigreur, la fixité du regard, la finalité des coulées du sang, la science regarde sans comprendre et par conséquent sans pouvoir expliquer.
Un des linges teint du sang qui découle de la Ste Hostie gardée sur l'autel depuis le 18 février 1914, se revivifia et le sang parut frais et vermeil.
La vue d'une des Hosties sanglantes produisit une grande émotion au Vatican où elle séjourne pendant plus d'un mois.
Que puis-je ajouter à cet exposé sinon de vous dire que des miracles sans nombre se sont produits: des aveugles ont retrouvé la vue; les paralytiques la marche; les phtisiques leurs poumons, etc. etc. Les deux derniers miracles se sont accomplis sur deux jeunes gens, l'un de 17 ans et l'autre de vingt ans. Celui de 17 ans, abandonné des médecins, recouvre la santé et les poumons presque instantanément ; celui de vingt ans, enfermé dans un appareil depuis cinq ans ,le quitta instantanément et le laissa dans la Chapelle.
Le clergé de la petite ville de Chinon, en présence de l'émotion de toute cette ville, prit quelques informations et déclara comme conclusion que je guérissais par le démon!!! La même chose fut dite du Bon Maître par les prêtres de la synagogue. Maintenant, cher Monsieur, je vous laisse a votre conscience pour juger comme elle vous le dictera ce fait que le professeur Nazari qualifiait d'inouï dans l'histoire du surnaturel. Faites aussi ce quelle vous dictera sans crainte des hommes. Je vous bénis, vous et votre famille, et bien affect, votre
A.Vachère de Grateloup, c.v.g. »[7]
[1] Maurice Maximilien (ou Maxime) Théophile Millet, né le 22 septembre 1890, agriculteur, marié à Emilienne Aurélie Marthe Etineau, décédé le 21 octobre 1976 - Amberre, 86002, Vienne, Poitou-Charentes, France, à l'âge de 86 ans, deux enfants (dont Bernadette, épouse Girault). AHDP, D. 2-2.
[2] « Pour copie conforme à ma copie de Mgr vachère, Petite Rosselle, 9 juin 1923, Jean Scheuer. » AHDP, D. 2-2.
[3] « Pour copie conforme à l’original, Petite Rosselle (Moselle) le 9 juin 1923, Jean Scheuer. » AHDP, D. 2-2.
[4] DEV.V.1912_1_4_102.103.
[5] Lettre du 13 avril 1916 à Mme Besnard.
[6] Lettre du 17 juillet 1912 à Mme Besnard.
[7] Copie à la Bibliothèque d’Etat de Bavière, fonts F. Von Lama, Schriftsteller, Ana 445. Le copiste ajoute cette note : «L'évêque Humbrecht de Poitiers a écrit de sa propre main au curé Gaessler à Scherlenheim la même semaine qu'il a fait condamner le premier tableau de Mirebeau, sur une carte représentant le miracle de la croix de Migne (!): « L'Evêque de Poitiers vous envoie, depuis Migné, à vous et à votre paroisse sa paternelle bénédiction et un salut sympathique de tous les habitants de Migné. + Louis, Ev. de Poitier. 17 décembre 1911. -Migné. »
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